> « L’éloge des abeilles » : des apiculteurs recueillent un essaim dans un arbre pour le placer dans une ruche; d’autres ouvrent une ruche en bois suspendue, et y récoltent pains de cire et miel. Le texte sous l’enluminure fait l’éloge des abeilles qui produisent miel et cire, et qui sont aussi le symbole de la chasteté, à l’image de la Vierge, mère de Dieu. Rouleau Exultet Barberini, Bibliothèque Vaticane, v.1087.

L’Exultet de Pâques
Cette enluminure est extraite du « Rouleau Exultet Barberini ». « Exultet » fait référence à un épisode des fêtes de Pâques dans la chrétienté occidentale. Quand l’obscurité s’étend au soir du samedi de Pâques, lors de la veillée, on bénit un grand « cierge pascal » avant qu’il soit allumé. En trois étapes, il permet ensuite d’allumer de multiples autres cierges, ce qui illumine peu à peu toute l’église, annonçant l’aube du jour nouveau, du royaume de la résurrection. Les chants qui accompagnent cette bénédiction de la lumière sont nommés, d’après le premier mot, « Exultet » [ Il se réjouit, réjouissez-vous…]. Les abeilles sont évidemment doublement associées à l’événement : par leur cire qui permet de fabriquer les cierges blancs, et par les symboles de pureté et de chasteté qu’elles représentent dans la chrétienté ancienne.
Le rouleau Exultet Barberini comprend plusieurs enluminures, des commentaires en face de celles-ci, et des indications musicales (les neumes) pour le chant, entre les lignes des textes. Il est daté d’environ 1087, et sa restauration (après une inondation) du XIIIe siècle. L’écriture dite « bénéventine » du texte permet de localiser sa production dans la grande abbaye bénédictine du Mont Cassin (Monte Cassino, Latium italien), dans le contexte de la réforme liturgique grégorienne du milieu du XIe siècle. A la différence de la plupart des Exultet de l’époque, il s’agit d’un rouleau (qui était suspendu lors des cérémonies de Pâques), et non d’un codex.
Dans la collection des Barberini
Le rouleau est conservé à la Bibliothèque du Vatican (Biblioteca Apostolica Vaticana, Codex Barberini Latinus 592). Il provient des collections de la célèbre famille florentine puis romaine des Barberini, qui a donné aux XVIe et XVIIe siècles un pape (Urbain VIII, 1623-1644), de nombreux cardinaux et autres prélats, et de riches marchands. Ils ont été de grands mécènes de la Renaissance italienne et de la Rome baroque. A la suite de conflits intra-italiens, une partie des Barberini ont du se réfugier à Paris, se plaçant sous la protection de Mazarin, puis de Louis XIV. Les armes de la famille Barberini sont bien connues : trois abeilles d’or en triangle. On les retrouvent sur de nombreux édifices romains (dont le Palais Barberini, édifié par Le Bernin), sur les nombreuses sculptures et statues du Bernin, sur des armures de parade, sur des enluminures, sur des reliures de livres, etc. La bibliothèque des Barberini a plus tard été intégrée à la Bibliothèque vaticane.

REFERENCES:
NEWTON Francis, The Scriptorium and Library at Monte Cassino, 1058-1105, Cambridge (UK), Cambridge University Press, 1999, 448 p.
Sur le rouleau Barberini :
CAVALLO Guglielmo, SPECIALE Lucinia Speciale, Die Exultetrolle. Codex Barberini Latinus 592, Biblioteca apostolica vaticana, Zürich, Belser, 1988
https://dcl.elevator.umn.edu/asset/viewAsset/56e027907d58ae2e318bb0fc#56e027917d58ae2e318bb102
Sur l’Exultet : http://imaginemdei.blogspot.fr/2013/03/exult-easter-proclamation.html
Sur les Barberini :
RIETBERGEN Peter J. A. N., Power and Religion in Baroque Rome. Barberini Cultural Policies, Leiden, The Netherlands, Koninklijke Brill NV, 2005, 384p.
Sur les monnaies des Barberini, voir sur ce site: 1629-1637- Monnaies aux armes des Barberini
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